C’est une question difficile qui dépend beaucoup du contexte et qui nécessite aussi de définir ce qu’est la biotechnologie.

Selon l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), la biotechnologie est «l’application des principes de la science et de l’ingénierie au traitement de matières par des agents biologiques et pour la production de biens et de services» (1982). Si l’on se réfère à cette définition, des processus aussi ancestraux que la fabrication du vin, vinaigre, pain, fromage ou de la bière sont des biotechnologies, puisqu’ils font tous appel à des microorganismes (levures, champignons, bactéries) naturellement présents dans notre environnement. Or, à ma connaissance, et au-delà des problèmes d’alcoolisme ou d’infections alimentaires dues à des germes pathogènes contaminants (par exemple les salmonelloses), l’utilisation de «microbes» dans ces contextes n’a pas posé de problèmes majeurs.

Les problèmes (risques ?) potentiels liés à l’utilisation des microorganismes dépendront surtout du type d’activité, des organismes utilisés (OGM ou non), de l’échelle de production (artisanale ou industrielle) et de si le processus s’opère en milieu ouvert (dans l’environnement) ou confiné (dans un fermenteur). En principe, si on utilise des microorganismes dans des fermenteurs dont les tailles peuvent maintenant être considérables (jusqu'à 100 m3 par unité), les risques pour l’environnement sont négligeables si les contenus sont systématiquement décontaminés avant d’être rejetés. Si l’on fait appel à des microorganismes qui existent déjà dans la nature, les risques sont aussi considérés comme moindre. Par exemple, on utilise depuis de nombreuses années plusieurs souches de Bacillus thuringiensis pour lutter contre les insectes, dont les moustiques. Ces traitements impliquent d’abord d’amplifier artificiellement le nombre de ces bactéries (dans des fermenteurs), puis de les disperser à grande échelle dans les lieux que l’on souhaite traiter : des forêts, des champs, des étangs, etc. Ces pratiques sont-elles pour autant sans risques ? C’est difficile à dire, puisque l’on connaît mal les effets sur notre environnement et, dans le long terme, celui de libérations répétées de grandes quantités d’un type de microorganisme qui a été artificiellement amplifié dans un fermenteur. Plusieurs études montrent que, généralement, les bactéries introduites dans un environnement autre que le leur disparaissent rapidement au profit de microorganismes déjà implantés et mieux adaptés aux conditions locales du milieu. Mais qu’en est-il des pools de gènes qui peuvent être transmis à d’autres bactéries?

Concernant l’utilisation d’organismes génétiquement manipulés (OGM), ce n’est que depuis une quarantaine d’années qu’ils sont couramment utilisés pour des applications de biotechnologie, par exemple avec la création en 1978 d’une souche d’Escherichia coli modifiée pour produire de l’insuline humaine. Depuis, les manipulations génétiques se complexifient et, ce faisant, conduisent à la création de microorganismes capables de répondre à de nombreux besoins de l’industrie. En général, peu d’OGM sont volontairement répandus dans notre environnement, et ceux qui le sont sont soumis à des autorisations pour dissémination très strictes. Pour les autres applications en milieux confinés (par exemple dans des laboratoires de recherche), la loi Suisse demande que les cultures soient détruites avant d’être incinérées avec les autres déchets.