Chaque année, plusieurs centaines d’enfants son admis à l’hôpital avec une partie de doigt manquante suite à un accident. Il a effectivement été remarqué que, dans certaines conditions bien précises, la partie manquante du doigt régénère complètement, sans traitement médical particulier (à part l’application d’un pansement humide pour protéger la plaie). Ceci n’est possible que lorsque l’amputation du doigt ne dépasse pas la dernière phalange et que l’âge de l’enfant est inférieur à 10-11 ans.

Le déclin de la capacité à régénérer au cours du temps n’est pas spécifique à la régénération du doigt: chez la plupart des espèces animales, ce "potentiel" de régénération s’amenuise ou disparaît totalement avec l’âge. Mais pourquoi cela? La réponse à cette question n’est pas encore établie, mais il existe plusieurs hypothèses. L’une d’elles est liée à la cicatrisation et à sa régulation par le système immunitaire: en général, il n’y a pas de régénération lorsqu’il y a cicatrisation, car ce sont deux processus bien distincts. Il se pourrait donc que des réponses immunitaires différentes chez l’enfant et l’adulte conduisent dans un cas à la régénération et dans un autre à la formation d’une cicatrice.

Une autre hypothèse importante concerne le recrutement de cellules qui ne sont pas spécialisées: les cellules souches. Ces dernières sont capables de se multiplier et de se spécialiser ensuite en un ou plusieurs types de cellules. Elles sont indispensables à la régénération. Des études récentes menées sur des organismes relativement proches de l’humain, comme la souris, ont démontré que plusieurs types de cellules souches dites "adultes" (partiellement différenciées) résident dans les tissus et que ce sont ces cellules qui interviennent lors de la régénération du doigt. Il semblerait que, plus le temps passe depuis la période du développement embryonnaire, moins la région de la plaie devient capable de mobiliser ces cellules souches. Cela pourrait, par exemple, provenir du fait que ces cellules deviennent avec le temps réfractaires aux signaux émis par la plaie, une sorte de vieillissement cellulaire, ou que ces signaux ne sont pas transmis correctement chez l’adulte.

La deuxième partie de la question soulève en fait deux interrogations bien distinctes. L’une concerne l’utilisation d’êtres humains clonés, en tant que réserve "de pièces de rechange". Les barrières éthiques sont si fortes que cette possibilité n’est pas envisagée en pratique. La recherche dans ce sens n’est pas financée et, même si le clonage humain à des fins thérapeutiques devenait techniquement réalisable, il ne serait probablement pas utilisé. Par contre, certaines entreprises ou hôpitaux proposent de stocker dès la naissance une petite quantité de cellules souches embryonnaires provenant du cordon ombilical, afin qu’elles puissent dans le futur être utilisées pour soigner des maladies ou des blessures chez les personnes dont elles proviennent.

Qu’en est-il si vous n’avez pas votre propre stock de cellules souches à disposition? Heureusement, la recherche dans ce domaine avance à grands pas. Par exemple, deux techniques permettent maintenant de produire des cellules souches à partir de cellules différenciées. Les inventeurs de ces deux techniques ont été d’ailleurs récompensés par un prix Nobel en 2012. D’autre part, un domaine de recherche très actif actuellement, la médecine régénérative, vise soit à stimuler la régénération, soit à produire des tissus, voire des organes entiers, en utilisant ces cellules souches. Finalement, si une cellule différenciée est prélevée de votre peau, par exemple, puis dédifférenciée en laboratoire, afin qu’un nouvel organe soit produit et transplanté, plus besoin d’utiliser du matériel provenant d’un être humain cloné ou d’une autre personne!