Schématiquement, le principe économique régissant la mondialisation - qui est en fait une accélération et une amplification dans échanges entre différents partenaires commerciaux autour du globe - est de favoriser la spécialisation de chaque pays dans un domaine ou il possède un avantage comparatif. L’idée derrière cette conception économique est que, si les différentes parties commerçantes - en l’occurrence les différentes nations - se spécialisent dans un type de production plutôt que de disperser leurs forces dans tous les activités à la fois, la complémentarité des échanges dégagera une plus-value. C’est en quelque sorte l’idée de diviser les activités pour être plus efficace.

C'est ainsi que, par exemple, certains pays d'Amériques Latine échangent sur le marché mondial plutôt des produits agricoles alors que les pays occidentaux se concentrent sur la production de produits manufacturés à haute valeur ajouté. Peu à peu les nations sont donc devenues beaucoup plus interdépendantes et beaucoup moins autarciques. Idéalement, dans une telle perspective la plus-value engendrée par la mondialisation se redistribue entre les différentes parties à l’échange. Toutefois, ce phénomène n'est pas parfait car de nombreux rapport de pouvoir concernant la redistribution de cette plus-value globale existent et des inégalités demeurent.

Pour maintenir leur train de vie les nations occidentales se sont petit à petit focalisées sur la production de biens et services à forte valeur ajoutée basée sur une suprématie technologique (biotechnologie, aéronautique, etc.), culturelles (branding et marketing) et financière (services financiers et assurances). Une course aux savoirs s’est engagée et, progressivement, les activités purement industrielles ont été délocalisées. Cette course aux savoirs s’est par exemple illustrée au travers de certaines politiques cherchant à former et recruter les meilleurs chercheurs de différents pays pour bénéficier de leur compétence et ainsi rester compétitif (certain auteurs parlent de « brain drain »). Parallèlement à cela, de nombreux outils financiers ou institutions financières ont été développés pour permettre des investissements plus aisés à l’échelle planétaire. Aussi, les pays développés ont développé de nombreux services dans ce domaine permettant de créer une forte valeur ajoutée. Ainsi, une concentration des savoirs et de la finance est apparue dans ce que nous appelons couramment les pays développés (Europe, Etats-Unis, Japon, etc.). En grande partie, cette accumulation, source de pouvoir, a permis à ces nations de garder un contrôle sur le marché international et de pouvoir s’octroyer une grande part de la plus-value créée par la mondialisation.

Certes, certains nouveaux pays sont parvenus à en bénéficier. Les cas les plus souvent cité sont ceux de la Chine, de l’Inde, de la Russie et du Brésil. Annalee Saxenian (The New Argonauts: Regional Advantage In A Global Economy, 2007) explique par exemple comment certaines régions de Chine et d’Inde sont parvenues également à entrer dans le jeu de la course aux savoirs en profitant du retour de chercheurs indigènes ayant étudié et pratiqué quelque temps aux Etats-Unis. Toutefois, ce phénomène ne remet pas fondamentalement en question le fait que les bénéfices de la mondialisation sont redistribués inégalitairement. Il montre simplement l’apparition de nouveaux acteurs le long de la hiérarchie de nations commerçantes.

Finalement, il ne faudrait surtout pas oublier que le phénomène qui vient d’être décrit à l’échelle des Etat-Nations est également vrai à l’échelle des régions. En effets, l’accumulation des savoirs et de la finance a laissé pour compte de nombreuses régions au sein de pays. Le cas des régions de l’automobile aux Etats-Unis en est un bel exemple. De même, gardons à l’esprit que dans les pays en transition, c’est surtout quelques régions urbaines qui tirent le meilleur profit de la mondialisation. Il en est de même pour la concentration du pouvoir financier dans un petit nombre de villes interconnectées (Saskia Sassen, The Global City, 2001).

Il est très difficile de dire si la mondialisation est bénéfique à tous les pays. Certainement a-t-elle permis une croissance économique sans précédant à un niveau mondial. Cependant, cette plus-value s’est faite en grande partie sur l’exploitation de ressources naturelles dont le coût sur l’environnement global a certainement été sous-estimé. Une chose semble toutefois claire, et la crise financière actuelle est là pour le rappeler, les pays du globe sont devenus extrêmement interdépendants. Et si la répartition des bénéfices de la mondialisation restera discutée, le partage de ses problèmes est incontestable.