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Les os brûlés de la grotte de Cotencher

Pas très spectaculaires mais tellement intéressants
Pas très spectaculaires mais tellement intéressants
Au feu, au feu! Qu'est-ce que l’archéologue peut apprendre de quelques os brûlés mis au jour dans une grotte? Et quelles sont les questions, hypothèses ou théories suscitées par une telle découverte? Retour sur la préhistoire la plus reculée de Suisse, dans un univers empreint de mystères, de croyances et d’interrogations, à l'époque de Néandertal, avant la dernière glaciation.

S’il est des vestiges qui n’accrochent pas d’emblée le regard du visiteur, au Laténium, ce sont bien les os brûlés de la grotte de Cotencher. Et pourtant: quoique peu spectaculaires, ces objets livrent un témoignage important sur la vie quotidienne en Suisse, il y a plus de 40'000 ans. Ces os sont en effet ceux d'une espèce aujourd'hui disparue: l'ours des cavernes, qui occupait ces grottes à l'époque de l’homme de Néandertal.

Vous, promeneurs qui empruntez le sentier qui longe les gorges de l’Areuse, ne savez-vous pas qu’à quelques dizaines de mètres au-dessus de vos têtes se trouve une caverne, protégée par d’épais barreaux en métal? Fermée au public pour des raisons de sécurité, la grotte de Cotencher est un site moustérien ayant livré un grand nombre d’ossements appartenant à une soixantaine d’espèces animales différentes, dont une majorité à l’ours des cavernes. Ces ossements étaient associés à des outils en silex et à une mâchoire supérieure d’homme de Néandertal.

Avant la découverte de ce vestige humain, la présence de l’homme dans la grotte avait déjà été supposée par l'identification de foyers et d’os lissés et polis. Pendant plusieurs décennies, les archéologues ont même cru à l’existence d’un «culte» de l’ours des cavernes, qui semblait faire l’objet d’une chasse systématique et d’une vénération particulière de la part des Néandertaliens. Grâce aux avancées de la recherche, ce mythe a pu être déconstruit. On sait maintenant que les étranges alignements de crânes et d'ossements d'ours le long des parois sont dus à des phénomènes naturels: ces impressionnants plantigrades ont simplement occupé ces grottes lorsqu'elles étaient désertées par les groupes humains.

Chrystel Jeanbourquin, archéologue diplômée de l'Université de Neuchâtel, doctorante à l’Université de Genève et guide-animatrice au Laténium

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Grotte de Cotencher

Mentionnée pour la première fois en 1523, la grotte de Cotencher se situe sur la commune de Rochefort (NE), dans les gorges de l’Areuse, à 660m d’altitude. Longue de 18m et d’une surface de 200m², elle a été fouillée par H.-L. Otz et Ch. Knab en 1867, puis entre 1916 et 1918 par les savants H.-G. Stehlin et A. Dubois. En sus de la fameuse mâchoire de Néandertal, il s’agit de l’un des sites moustériens d’altitude ayant livré le plus d'objets en silex (plus de 400 pièces).

Moustérien

Défini au 19e siècle grâce à l’étude des silex mis au jour sur le site du Moustier (Dordogne, France), le Moustérien est le nom donné à la culture matérielle de l'époque du Paléolithique moyen en Europe (env. 400'000 à 40'000 ans av. J.-C.).