L'UFO Club de Londres

Grand Format

Introduction

Les soirées en 2017, on sait à quoi ça ressemble. Mais qu’en était-il il y a une cinquantaine d’années, à une époque où naissait la culture underground?
En 1967, quand on était londonien, jeune et qu’on emmerdait l’establishement, on allait au club UFO, là où se dessine une nouvelle culture, qui transite par la musique, le graphisme, les écoles d’art et le journalisme. Retour sur un club icônique du Swinging London.

Le "Summer of love" londonien

Le Summer of Love a été américain, mais il a aussi été londonien. Dans le West End de la capitale du Royaume-Uni, ça bouge. Dans les sixties, cet endroit est un véritable aimant qui attire une faune avide de changement. Cette foule se rassemble entre fin 66 et 67 dans l’UFO Club, une ancienne salle de bal irlandaise sur Tottenham Court Road.

Pour 10 shillings, c’est-à-dire une demi livre sterling, on pouvait pénétrer dans ce lieu un peu vieillot et sombre, mais sublimé par des odeurs de patchouli, rehaussé par les reflets or et argent d’affiches de soirées.

Plus que l'UFO Club, c’est son groupe résident, du moins pour les premières soirées, qui est resté célèbre. Ce groupe, c'est Pink Floyd et d’autres avant-gardistes du rock psychédélico-progressif comme Soft Machine et le flambant Arthur Brown.

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Audioguide - Publié le 24 avril 2017

C’est John Hoppy Hopkins, le photographe et Joe Boyd, un producteur américain, qui ont décidé de faire de cette vieille salle un lieu où la foule hétéroclite de Soho pouvait se rencontrer.

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Audioguide - Publié le 25 avril 2017

John Hoppy Hopkins

John Hoppy Hopkins avait le chic pour faire s’agiter les molécules de l’underground. Au début des années 60, il avait patiemment traqué les personnalités hors du lot et dressé une liste de ces dernières. Cette liste, il l'avait copiée au papier carbone - l’ancêtre de la photocopieuse - et en avait distribué un exemplaire à chaque personne qui figurait sur ladite liste, créant la première version du réseau social tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Son et lumière

Les archives et témoignages nous laissent une image parfaite de ce que devait être l’UFO Club de Londres il y a 50 ans. L’une des composantes immanquable de l’ambiance psyché des sixties, c'est bien sûr le light show - un poncif dans la panoplie du trip parfait.

L'objectif est de retranscrire sur papier, ou à travers la lumière et les projections, les flashes expérimentés lors de la prise de LSD. Il fallait donc y consacrer tout le soin possible, et chaque club important de cette époque possédait son propre spécialiste des effets et de la lumière. C'était parfois un spectacle tout aussi important que le groupe sur scène.

A l’UFO, c’est un certain Jack Henry Moore qui était chargé de cette mission. Il avait créé au départ ses light shows - nous raconte Barry Miles - pour soigner les patients des hôpitaux psychiatriques. Certains shows étaient l’œuvre de ces patients.

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Audioguide - Publié le 26 avril 2017

International Times

La nouvelle presse underground londonienne est le reflet imprimé d'une effervescence à mi-chemin entre un marxisme révolutionnaire et un esprit zen, le tout bien alimenté par les hallucinations dues au LSD.

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Audioguide - Publié le 27 avril 2017

Dans les librairies arty et underground de la capitale, on peut se procurer depuis octobre 66 un nouveau magazine: International Times. On retrouve derrière cette publication à nouveau la patte de notre John Hopkins mais aussi John Peel, Barry Miles, Allen Ginsberg, William Burroughs, et Mick Farren, chanteur du groupe The Deviants.

Le début de la fin

Un lieu d'improvisation avant tout

L’histoire de l'UFO Club frappe en premier lieu par une durée de vie courte, mais intense.

Difficile de faire tenir longtemps un club où la vente d’alcool est interdite et où les entrées varient tous les soirs. A cela s’ajoute le côté expérimental et ingérable des groupes qui proposaient environ 80% de bouillie sonore contre 20% de musique réellement intéressante.

La scène était un lieu d’improvisation avant tout et les groupes en profitaient.

Comme l’a rappelé Barry Miles:

"La scène underground n’était pas aussi simple que la légende veut bien le laisser croire, et tous ses acteurs n'étaient pas non plus des amis intimes. De semaine en semaine, l'UFO était de plus en plus fréquenté, et l'affluence devenait désagréable. Au même moment, certains tabloïds publiaient des « révélations sur ce qu’on avait vu au club », encourageant la police à agir."

Craignant qu’on ne lui retire sa licence d’alcool, le propriétaire des lieux demanda aux patrons du club de débarrasser leur foutripi et l’UFO se retrouva sans domicile fixe à l’aube de 1967.

On chercha un nouvel endroit, qui se concrétisa au Roundhouse de Camden Town, donc très loin du centre bien desservi de la ville.

"Au Roundhouse, l’UFO était méconnaissable, le petit local sombre de Tottenham Court Road encourageait l'intimité alors que la nouvelle salle était immense. Pour payer le loyer beaucoup plus élevé, il fallait mettre à l'affiche des groupes plus importants et même Pink Floyd demandaient à présent 400 livres", précise encore Barry Miles.

Octobre 1967 - The End

L’UFO a commencé à fonctionner à perte et le club a fermé en octobre 1967 - réussissant tout de même à rentrer dans la culture populaire et à lancer l’idée tenace qu’on pouvait faire les choses soi-même.

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Audioguide - Publié le 28 avril 2017

Dix ans plus tard, même s’ils se déclaraient ennemis jurés des hippies, les punks reprendront le do it yourself à leur compte et créeront un nouvel underground...