En 1974, Genève se prononçait contre la pratique de la chasse sur tout le territoire du Canton.
40 ans plus tard, ce fait unique en Europe continue de diviser pro et anti chasse.
Il révèle également un clivage entre urbains et ruraux dans la perception que les uns et les autres ont de la nature.
Cʹest par la voie des urnes, suite à une initiative populaire lancée par les milieux de protection de la nature en 1974, que les genevois, majoritairement urbains, ont interdit la pratique de la chasse sur leur territoire. Mais le son du fusil sʹest-il tu pour autant? Pas tout à fait. Car pour réguler les populations dʹanimaux sauvages, les sangliers en particuliers, les garde-faunes genevois doivent pratiquer régulièrement des tirs. Entre 150 et 200 sangliers sont ainsi abattus chaque année.
Protéger la faune, cʹétait le but des initiants. Mais en protégeant la faune, il a fallu également développer une stratégie de protection des cultures au moyen de clôtures. Installées le plus souvent aux périodes critiques (par exemple à lʹapproche des vendanges), ces clôtures donnent bien du fil à retordre aux agriculteurs, au sens propre comme au sens figuré! Un surplus de travail pour les exploitants, et un surcoût pour lʹadministration qui subventionne ces installations. Avec cet exemple sur le vignoble de Fabian Rochais, dans le mandement genevois: ce jeune viticulteur a en effet repris lʹexploitation familiale et se bat depuis des années contre les attaques des sangliers et désormais des chevreuils.
Mais au-delà du domaine de la lutte, les clôtures de protection symbolisent aussi les différences culturelles de représentation de la nature entre urbains et ruraux, ces derniers ayant parfois le sentiment dʹune inversion des valeurs: paysans clôturés contre faune sauvage en liberté. Cʹest ce quʹa révélé Manue Piachaud, une jeune anthropologue genevoise dans un récent travail de Master pour lʹUniversité de Neuchâtel.
En dépit de ces problèmes, lʹinterdiction de la chasse à Genève est une réussite. Cʹest la conviction de Gottlieb Dändliker, inspecteur de la Faune à la Direction générale "Nature et Paysage" du canton. En 40 ans, la richesse faunistique de ce dernier sʹest améliorée. Oiseaux dʹeau, petite faune et grand gibier ont ainsi recolonisés le territoire pour la plus grande joie des genevois qui puisent dans cette richesse naturelle un ressourcement salutaire.