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Amnesty International dénonce l'emprise des discours haineux

Présentation du rapport d'Amnesty International 2016/2017. [AFP - Valeriy Melnikov]
La Suisse épinglée par Amnesty International pour non respect des droits de l’homme / Le Journal du matin / 2 min. / le 22 février 2017
Le rapport 2016/17 d'Amnesty International condamne les discours de haine proférés par les responsables politiques, Trump, Erdogan et Duterte en tête. La Suisse y est aussi pointée du doigt pour la crise des migrants à Côme.

Le document publié mercredi à Londres alerte sur les conséquences des discours "de rejet des autres" qui dominent en Europe, aux Etats-Unis et ailleurs, alors que le populisme grignote du terrain. Cette période rappelle à bien des égards les années 30, s'inquiète Amnesty International (AI).

"Trop de responsables politiques tentent de séduire l'électorat en répondant aux craintes légitimes en matière économique et de sécurité par une manipulation pernicieuse des politiques identitaires, de nature à semer la division", affirme dans ce rapport Salil Shetty, secrétaire général d'AI.

Les discours clivants des marchands de peur sont devenus une force dangereuse dans les affaires de la planète.

Extrait du rapport 2016/17 d'Amnesty International.

Discours antiféministes

Plusieurs dirigeants sont nommément cités: le président américain Donald Trump, le Premier ministre hongrois Viktor Orban, le président turc Recep Tayyip Erdogan et le président philippin Rodrigo Duterte. "Les discours clivants des marchands de peur sont devenus une force dangereuse dans les affaires de la planète", résume le rapport.

Le décret anti-immigration signé peu après l'entrée en fonctions de Donald Trump n'est pas du goût de l'ONG. Le rapport cible aussi le président pour sa politique de l'"homme fort" qui se traduit par une montée des discours antiféministes ou défavorables à la communauté LGBTI (homosexuel(le)s/bisexuel(le)s/transgenres et intersexués).

A ce titre, la Pologne est aussi montrée du doigt en raison "des tentatives de recul sur les droits des femmes" (avortement) qui ont déclenché depuis l'été des manifestations monstres dans le pays.

>> Lire : "Grève des femmes" en Pologne contre l'interdiction quasi totale de l'avortement

Effet domino

Les "discours anti système (...) défendent des programmes nocifs", poursuit le rapport. De plus, les diatribes "s'acharnent sur des groupes entiers de population, les désignent comme boucs émissaires et les déshumanisent", s'indigne Amnesty International.

"De puissants Etats reviennent sur leurs engagements en matière de droits humains, faisant craindre un effet domino". Autre constat: "l'expression 'plus jamais ça' a perdu tout son sens compte tenu de la passivité des Etats face aux atrocités massives qui sont commises", observe Salil Shetty.

L'expression 'plus jamais ça' a perdu tout son sens.

Salil Shetty, secrétaire général d'Amnesty International.

36 pays ont violé le droit international

"Les limites de l'inacceptable ont bougé" l'année passée. Selon AI, la misogynie, le racisme et l'homophobie sont devenus monnaie courante.

En 2016, "des gouvernements ont fermé les yeux sur des crimes de guerre, conclu des accords qui affaiblissent le droit d'asile, adopté des lois qui bafouent la liberté d'expression, incité au meurtre de personnes accusées de consommer des stupéfiants, justifié la torture et la surveillance de masse et élargi des pouvoirs de police".

Parmi les premières victimes du climat actuel, AI cite les réfugiés et les migrants ("boucs émissaires faciles"). Selon son décompte, 36 pays ont violé l'an passé le droit international en renvoyant illégalement des réfugiés dans des pays où leurs droits étaient menacés.

L'Union européenne n'échappe pas à ce réquisitoire. Le rapport l'égratigne à propos de "l'accord illégal et irresponsable" conclu avec la Turquie et permettant à l'UE de renvoyer des réfugiés dans ce pays.

>> Ecouter l'interview de Manon Schick, directrice d'Amnesty Suisse :

Manon Schick, directrice d'Anmesty Suisse. [Keystone - Peter Schneider]Keystone - Peter Schneider
Amnesty International dénonce l'emprise des discours haineux / Le 12h30 / 4 min. / le 22 février 2017

>> relire aussi : L'UE et la Turquie s'entendent pour freiner l'arrivée des migrants en Europe

ats/fme

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La Suisse pointée du doigt face à la crise de Côme

Le renvoi forcé depuis l'été de milliers de demandeurs d'asile de Suisse vers l'Italie est critiqué par Amnesty International. L'organisation dénonce en particulier des contrôles au faciès et le refoulement de mineurs non accompagnés venant de Côme, en Italie voisine.

Le rapport accuse les gardes-frontières suisses d'avoir empêché de nombreux migrants de solliciter l'asile en Suisse. "En refusant ce droit, les gardes-frontières violent le droit suisse", s'insurge Amnesty.

Mineurs non accompagnés

Beaucoup de migrants interrogés par Amnesty à Côme ont indiqué avoir sollicité en vain la protection des autorités suisses. Nombre d'entre eux auraient déposé une demande d'asile à plusieurs reprises, sans résultat. AI indique avoir discuté avec des jeunes qui ont tenté d'entrer en Suisse jusqu'à huit reprises.

Plusieurs centaines de mineurs non accompagnés se sont présentés à la frontière suisse et n'auraient pas fait l'objet "de l'attention requise" eu égard à leur vulnérabilité et aux exigences de la loi sur l'asile relative à la protection de l'enfance. Durant toute l'année 2016, "les gardes-frontières ont renvoyé vers l'Italie des douzaines de ces mineurs ayant de proches parents en Suisse", condamne l'ONG pour qui l'intérêt supérieur de l'enfant doit primer dans ce cas.