La radio pédagogue

Le poste radio au centre de la vie de la famille dans les années 50. [RTS]
  • Société
  • Audio 16 min.

3 juin 1944

Emission sans nom

"La radio cette nouvelle façon de présenter aux hommes, l'art, la vie et la science est de nature à favoriser singulièrement le développement du sens esthétique et social". Les propos du compositeur et pédagogue Emile Jaques-Dalcroze, au début de sa causerie, rappellent les attentes immenses que l'on a sur ce nouveau media.

Pour lui, la radio va jouer un rôle important dans la connaissance de l'art, de la beauté et aussi de la musique, classique bien sûr. Il évoque déjà ce que la télévision pourra, elle aussi, amener aux enfants.

La radio permet de connaître de la musique du monde entier. Le pédagogue genevois parle du bon peuple à éduquer sur un ton très paternaliste qui marque une époque, tout comme quand il parle du jazz "qui nous fait connaître le tempérament des peuples sauvages".

(Source photo: TSR 1950)

A l’évocation du nom d'Emile Jaques-Dalcroze (1865 - 1950), aux oreilles et à la mémoire des Romands résonnent encore ses chansons poético-patriotiques ou ses comptines pour enfants. On se souvient aussi de sa méthode, La Rythmique, qui entraînait dès leur plus jeune âge les garçons et les filles dans une appréhension physique de la musique. Mais à regarder d’un peu plus près le parcours et la personnalité de Jaques-Dalcroze, on découvre un personnage atypique, moderniste et innovateur.

Dès 1911, son institut d'Hellerau, près de Dresde, attire la fine fleur de l'intelligentsia européenne: Diaghilev, George Bernard Shaw, Honegger, Claudel, Le Corbusier, Ansermet et bien d'autres. Son rêve allemand brisé par le Première Guerre mondiale, Jaques-Dalcroze crée en 1915 un nouvel Institut à Genève, et se partage désormais entre pédagogie musicale et composition. Si ce mélodiste de génie a fait entrer bon nombre de ses chansons dans le patrimoine choral helvétique, son oeuvre symphonique et de musique de chambre reste encore méconnue. On la redécouvre aujourd'hui avec étonnement: ne fut-il pas l'élève de Bruckner à Vienne et de Delibes et Fauré à Paris?